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 LES MEURGERS

Brochure : Les meurgers (ou murgers) habitat rural en pierre sèche.
(Editée par Association des Guides de Pays de la Vallée de L'Yonne - Josiane MAXEL)

   Sommaire :

  1. ENTRE YONNE ET CURE, UN PAYS DE PIERRE

  2. ETYMOLOGIE MEURGERS/MURGERS

  3. ORIGINES DES MEURGERS

  4. VESTIGES LITHIQUES

  5. INTERETS DU BIOTOPE

  6. A PROPOS DES MEURGERS

  7. LE PAYSAGE DE NOS "COUTAS"

  8. GALERIE DE PORTRAITS

  9. SOURCES ET CONTACTS

 


ENTRE YONNE ET CURE, UN PAYS DE PIERRES

                                                                                                    par PIERRE  HAASE

 


Photo : Roland Brisset (Mailly le Château)

Quand en 1696 Vauban décrivait l’Election de Vézelay, un des qualificatifs qui reviennent le plus souvent sous sa plume est l'adjectif " pierreux" qu'il associe volontiers à " sec et aride". La nature des sols et des sous-sols, la prégnance du calcaire sur ces zones bordières du Morvan, autrefois lagunes côtières à l'ère secondaire, ont en effet fortement marqué les paysages. L'élément humain fit le reste : «  L'établissement d'un système agricole représente souvent ce qu'il y a de plus durable dans l'apport d'une civilisation... Tout paysage humanisé est le reflet d'une histoire » écrivait en 1948 le géographe Roger Dion dans sa leçon inaugurale au Collège de France. Et dans nos régions, la présence de la vigne depuis l'époque gallo-romaine, entre autres facteurs ayant modelé le paysage, ne fit qu'accentuer des traits auxquels la géologie prédisposait. 
En une époque présente où la réduction des surfaces agricoles est la règle, il nous est difficile d'imaginer combien nos prédécesseurs eurent au contraire à coeur de valoriser le moindre recoin, la plus inaccessible, la plus ingrate, la plus reculée parcelle cultivable, et combien le seul mot d'ordre était le recul des limites : limites des zones forestées, limite des zones empierrées, pour occuper des climats dont la micro toponymie atteste encore de la nature première que de " Perrières" ( Mailly la Ville, Blacy, Asquins, Arcy ), de " Laverons" ( Foissy ou de " Lavières" Sacy, Asquins, Mailly la Ville, Joux, Tharot, Givry), que de "champs des Pierres" ( Cussy, Domecy/Cure, Domecy/le vault), de "Pierrotte" ( Pontaubert ) ou de "Pierrelée" (Annéot)... Et les multiples " Murgers" !

N'allait-on pas, en plein XIXème siècle, jusqu'à reconvertir, au prix d'un labeur manuel insensé, en terre arable, les bermes abandonnées des sections déclassées de la route royale n°6 entre Vermenton et Avallon ? Et cent ans avant, Rétif de la Bretonne atteste dans " La vie de mon père" du souci de son géniteur et des habitants de Sacy et de Joux de faire reculer les meurgers qui envahissaient plateaux et "côtats" depuis l’expansion des vignobles monastiques au XlIème siècle. Six siècles d'épierrage, de remontée de terres à la hotte, de plantation par provignage "en foule", avaient engendré de monstrueux pierriers qu'on proposait de raser en les utilisant à empierrer les routes en y affectant des escouades de prisonniers gardés par la troupe. En l'an Il de la première République, le citoyen Antoine Aubry, imprimeur officiel à Avallon et zélateur du nouveau régime, reprit l'idée à son compte en préconisant d'occuper ainsi utilement les prisonniers de guerre. C’est que ces "meurgers" finissaient par devenir envahissants. Un proverbe d'Irancy, cité par Jossier en 1882 dans le Dictionnaire des patois de l'Yonne, donne une version basse-bourguignonne d'un adage connu :

 " Les pierres vont toujours au meurgis"! Une fois prélevées les grandes " laves" qui servaient à bâtir et couvrir, restait une masse de pierraille informe que les paysans entassaient à l'extrémité des parcelles. Parfois parementés pour pallier l'effondrement prévisible de ces masses pyramidales ou en cordon les meurgers font désormais partie du paysage entre Yonne et Cure, au même titre que d'autres vestiges. Du paysage et du patrimoine. Refuges de quelques espèces calcicoles, encrêtés des aigrettes du séneçon, ou des sénevés jaunes, rubéfiés par les lancées du liseron rose, les meurgers sont désormais à la merci des entreprises de granulat, tandis que dans les champs les broyeurs ont résolu définitivement le problème de l'épierrage, faisant disparaître en même temps les fossiles, voire les vestiges archéologiques. Car nos meurgers, indatables en dehors du contexte économique qui suscita leur édification, prennent souvent appui sur des vestiges plus anciens.



Photo : Bernard Fèvre (Guillon)

 

Difficiles, voire impossibles, à changer de place, ils ont suscité ce qu'on pourrait qualifier de "paysage fixé", comme le sont en d'autres régions les paysages de "faîsses" ou de "restanques", ces terrasses lisibles dans le midi, des siècles après leur abandon. Si l'on accepte qu'ils naquirent avec la viticulture monastique, ils ont donc au moins mille huit cents ans pour certains ou pour le coeur de certains. Se développant en périphérie des clos, ils ont pu être organisés, comme l'a suggéré naguère l'Abbé Lacroix, pour donner accès à des parcelles d'accès difficile. Terrasses, soutènement, escaliers les complètent, permettant aux vignerons et aux "hotteux" d'accéder. Ajoutons que les paysages viticoles ont toujours fait exception aux règles de la liberté agraire d'ancien régime et du pacage libre : la circulation d'animaux est préjudiciable à la vigne, le système des champs assolés ne s'y applique jamais, la règle étant au contraire la restriction d'accès, y compris aux propriétaires en période de maturation avant le ban. L'aspiration individualiste du vigneron trouvait son compte dans l'utilisation des déchets pierreux aux fins d'enclosure. Parfois soigneusement parementés, les meurgers témoignent d'un art de construction désormais perdu : l'édification à sec, sans autre liant qu'un peu de terre. Vignerons, mais aussi carriers, et récemment cantonniers maîtrisaient ces techniques. On a parlé à leur propos d'auto constructeurs pour signifier l'absence de recours à des professionnels de la maçonnerie.

 

 On ne connaît pas dans notre région de ces "prixfaits", contrats devant notaires par lesquels des paysans faisaient marché avec un maçon, comme on en trouve par exemple dans le Gard. Pourtant outre les meurgers, les aménagements sont parfois complexes et somptueux: l'expression la plus achevée en est à coup sûr les "loges" de vigne, mais aussi de carriers, de bergers, de cantonniers, mettant en oeuvre une technique délicate : la fausse voûte en encorbellement. Ces petites constructions, dans nos régions elles restent de dimensions modestes, de la simple guérite, à la maisonnette, servaient de remise à outils ou retiretout, d'abri pour la "marande" ou contre les intempéries, de réserve de "paisseaux". Ces constructions se retrouvent dans toutes les zones où affleure la pierre, y compris non calcaire : mais c'est surtout l'est, le centre et le sud de la France qui les connaissent sous une multitude d'appellations. En Bourgogne, cadoles mâconnaises, cabordes des tonnerroises et auboises, borniottes, cabottes, cabiottes... En Avallonnais, le terme de "loge" ou "louège" semble prédominer ( un climat de Précy le Sec se nomme La Loge) avec un terme qui se retrouve en Berry et dans le Cher.


Photo : Jean-Claude Rocher (Mailly la Ville)

Relativement fragiles du fait de leurs techniques- les laverons sont posés en équilibre avec un dévers- et en l'absence de charpente, ces cabanes sont aujourd'hui en danger, encore plus que les meurgers. Parfois elles s'y appuient, voire y sont incluses, parfois elles se présentent isolément, plus ou moins enterrées, accessibles directement ou par des couloirs. Leur datation reste problématique, encore qu'aucun exemplaire ne comporte d'éléments datés ( linteaux, piédroits ) comme dans d'autres régions où les plus anciens édifices remontent au milieu du XVIlème siècle. Les aménagements restent sommaires, voire frustes : banquettes, placards, niches destinées souvent aux allumettes et à la salière ( dans un os creux ) parfois un foyer ou une cheminée, quelques fenestrons en forme de meurtrière pour éviter les courants d'air, quasiment jamais d'huisseries et très rarement des points d'eau ( comme à Monthelon, prés de Montréal. L'imbrication des vestiges d'origines, d'époques et de destinations diverses rend leur datation encore plus délicate : activités pastorales, parfois très anciennes, agricoles, voire défensives, se mêlent en une imbrication génératrice de confusion, d'ambiguïtés. Des sites de hauteur, Mont Libeuf de Saint Père, Montfaute de Guillon, Montapot d'Arcy, ont été réutilisés au fil des siècles. Lapinières, taissonnières ont contribué à mélanger les quelques marqueurs possibles, silex, tessons. Aucune étude archéologique sérieuse n'a d'ailleurs été tentée, ce type de vestiges « rnineurs » n'ayant suscité que le mépris ou l'indifférence des professionnels, peu sensibles au paysage lithique hors des sites classifiables. Et pourtant là, " la beauté existe... Celle du moindre cabanon à outil dans la vigne " (Francis Ponge Pour un Malherbe.) Le terme de meurger a été adopté ici par commodité. Il est d'ailleurs localement plutôt prononcé " meurgis", Robert Cornevin et Maurice Boujat citant même "meurgis' pour désigner une réunion de meurgers. On trouve de multiples variantes tant orthographiques que phonétiques: Rétif utilise indifféremment merger, meurger, murger, meurriée. En l'an Ill, Aubry se sert de meurger, terme qui dominera ensuite. Mais on trouve encore murget, murée, meurée, meurrier... Certains auteurs désignent par ce dernier terme les vestiges antiques en les distinguant des épierrement modernes ou mergers ( Mégnien, en Saône et Loire ) ; chez d'autres c'est affaire de parementage ou d'entassement en vrac. Roupnel utilise le terme murée. Un lieu-dit de Saint Brancher dans le canton de Quarré est appelé la Meurée. Sauvigny le Beuréal possède « une source des Murgers », Savigny en Terre Plaine ou Santigny ont des Meurgers, l'Isle sur Serein un Meurger Beursin, Coutarnoux un Meurgé, Joux un Meurger Meulon, Annéot un Meurger du Rhin. Séparant Brosses de Châtel-Censoir, on note le murger de Bellevue. Et l’Abbé Parat notait à Lucy le Bois un site des Meurgers, recelant des tumulus et cité dés 1740. Même connexion au Merger au Roi entre Surgy et Andryes.
Le terme n'a d'ailleurs rien de local. Dérivé du bas-latin « muricarius » ou tas de cailloux ou de coquilles, il se retrouve en d'autres régions, comme le Val d'Oise. Pergaud en fait le cadre d'un de ces contes franc-comtois dans « de Goupil à Margaux » : la conspiration du murger. Et B. Clavel, autre franc-comtois l'utilise fréquemment. Le terme était aussi lié en région parisienne aux anciens vignobles : ainsi Maisons-Laffitte possède une rue du Gros-Murger. Sans compter les légendes engendrées par de tels amoncellements de matériaux. La Roche en Brenil connaît une légende du Poron-Murger. Et Clément-Janin recueillit en 1884 à Gemeaux en Côte d'Or une légende de vouivre gardant un trésor Templier au Merger aux Fosses.

                                                                                                                        Pierre  HAASE  

Notes :

Meurger : tas d'épierrement ( ou meurgis )

Côta : côteau, pente cultivée ( ou coûtat)

Provignage : technique de reproduction de la vigne consistant à coucher dans une fosse un sarment pour le faire marcotter.

Foule (en) : plantation sans ordre, sans alignement.

Lave : plaque de pierre calcaire servant entre autres à couvrir les charpentes (ou laive) Marande : repas du midi

Paisseau : échalas ( ou paissiâ)

Taissonnière : terrier de blaireau

 

Cliquer ci-dessous pour agrandir les photos

[ Photos
 Meurgers1 ]

[ Photos
 Meurgers2 ]

 

Document n°1 : Plan et coupe d'un meurger
Asquins, Séchée

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Document n°2 : Plan Asquins, Séchée
Un vignoble disparu

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ETYMOLOGIE MEURGERS/MURGERS

 

Le Littré donne la définition suivante du mot meurgers :

MURGER : terme provincial, monceau de pierre de toute nature.
En Brie et en basse Bourgogne on dit MERGER.
On dit aussi MURGER et MEURGER
Cette enceinte est formée dans les restes d'un murgier fait de moellons
de craie, dont une grande partie subsiste aujourd'hui...
Péronne 1876 p 11 Histoire du XIIIème siècle : "Les entrées dou borc estaint closes de murgers ( tas de pierres)."
Histoire occidentale des croisades Tome II p404, XIVème siècle.
"Lequel Vallet ainsi mort, ledit Nicolas l’eust fait tragner aus champs et fait enterrer et couvir en un meugier de pierre."

Dans l'Yonne:

Déja Restif de la Bretonne donnait, dans "La vie de mon père " en 1778, des informations sur les techniques de parementage des murgers de Sacy. Le mot meurgers ou murgers est utilisé dans notre région pour dénommer différents types de construction en pierre sèche : de la cabane de vigne classique et bien connue au enceinte de pierre, sorte de chemin de ronde autour d'ancien castrum, parfois long de plusieurs kilomètres, substructures agricoles, limite parcellaire, tas de pierre dû à l’épierrement, ré-utilisation d'anciens vestiges archéologiques, tour de gué, abris, ermitages, refuges des populations lors des invasions, nombreuses dans nos vallées, ou encore véritable habitat rural semi-enterré, parfois avec plusieurs pièces, cheminée, couloir d'accès... Et la liste n'est pas close!
Dans le Tonnerrois existent aussi des cabottes, ou caillebotes, cabanes de vigne en pierre et liant, charmantes, un regain d'intérêt les sauvent de l'oubli. On en construit même, cela est induit par la renaissance de la vigne dans ce territoire. On voit donc la diversité de ce terme générique, qui a lui seul indique plusieurs sens. On ne parle pas des murs montés par les prisonniers de droits communs, sous Napoléon III. Toutes ces réalités induisent confusion et méconnaissance.


En France:

D'autres termes traverseront les âges et les régions, nous tenterons d'en livrer quelques uns des plus connus comme les cadoles, capitéles ou encore bories.

 

ORIGINES DES MEURGERS

 

L'appellation regroupe différents types de structures, on l'a dit, c'est pourquoi leurs origines divergent. Sur un même site comme à Mailly le Château on peut voir côte à côte des vestiges d'un tumulus de l'âge de fer et des épierrements de cabanes de Vignes. C’est pourquoi la confusion est grande. Il convient de noter que des zones concernées mériteraient un relevé systématique pour éviter l'éradication de ce témoignage ancestral de notre culture au sens large. L'exploitation de ces données, voire des fouilles archéologiques permettraient, une bonne fois pour toute, de signifier avec les moyens actuels des connaissances la datation de ces constructions si différentes les unes des autres. L'intérêt pour ce patrimoine bâti sans doute le plus ancien de notre région ne fait pas l'unanimité. Les raisons en sont l'ignorance, la négligence et les intérêts financiers de l'exploitation agricole que l'on ne peut nier. Il va de soit que les amoureux du territoire se sentent impuissants devant la destruction des sites en question lors des remembrements, ou une augmentation de capacité d'exploitation, en passant le bull de plus en plus loin, il y a donc matière URGENTE à donner la priorité à la prévention et à la reconnaissance de cette richesse.
Le juste milieu est déjà une notion dépassée, il y a péril en la demeure pour les habitants qui voient d'années en années la démolition des meurgers faire partie de leur quotidien. Le souhait des amoureux de l'authenticité de leur pays dans le respect de l’environnement est la défense " au moins" des zones non problématiques : fond des bois, friches... Ce qui implique une réglementation des arrêtés, un classement de protection et des hommes pour défendre ces meurgers !

Les pays de vignes sont les terrains privilégiés de ces abris, c'est encore des louèges, plus proche de nos loges, dans le pays des capitèles. Les cadoles ont servi parfois à abriter des ermites au XVIIIème siècle comme certaines de nos grottes ( Ravereau par exemple). Quant aux aggéres ou cabanes de Hallstat elles semblent bien exclusivement icaunaises...

Les cultures qui se sont succédées comme dans la région d'Arcy sur Cure, quasiment sans interruption, depuis le Paléolithique ancien jusqu'à nos jours déroulent l'impressionnant cortège de leurs témoignages. Chaque butte est couronnée de murets et de tumulus. Ces ensembles architecturaux sont dénommés "aggères". Si la plupart des tumulus ont vocation funéraire, les murets sont plus énigmatiques : s'agit-il de soubassement défensif de bordures de fonds de cabanes ou d'enclos à bétail ? « 530 tumulus et une soixantaine de murets ayant sept kilomètres de développement disposés sur une surface de 100 hectares environ » ont été recensés par l'Abbé Parat.

Les loges sortes de meurgers épars dans les collines sont donc parfois structurées en murets bordant les chemins délaissés. Quelques rares graffitis permettent de penser que ces édifications les plus septentrionales de France ont cessé et que leur savoir faire s’est perdu un peu avant 1900.Comment construisait-on ces sortes d' igloos parfaitement imperméables à la pluie ? Aucun liant, aucune pièce de bois n'y est jamais employé. Ces contraintes ont été prises en défaut, parfois il reste des traces de constructions abandonnées au moment délicat de l'achèvement de la voûte. Mais d'où vient cette pierre ? Rappelons que près de là la plus importante carrière à sarcophages de France a été mise à jour...



Photo : Jean-Claude ROCHER

 

 

VESTIGES LITHIQUES

 

Suivant les régions de France, mais aussi en Grèce, en Italie, en Sardaigne ( où on parle de nuraghi), les vestiges lithiques trouvent leurs "mots pour le dire".

En France certaines régions ont cherché à aller plus loin, en préservant, en restaurant, en classant les sites ou même, en ouvrant au public des sentiers destinés aux curieux, comme dans l'Hérault avec le "Chemin des Capitèles ".

Des scientifiques, des passionnés ont créé, des Associations, qui informent et redonnent vie à ce patrimoine. Dans certaines régions, l'origine de ces vestiges lithiques est parfaitement connue car leur processus de fabrication est spécifique, à une époque.

Dans le Périgord on retrouve les traces de ces vestiges dans le Haut Quercy. L’épierrement parementé remonterait au XIXème siècle dans cette région, mais des ouvrages lithiques existants ont été remaniés, au cours des trois derniers siècles; cela est attesté.

En Dordogne certaines cabanes sont classées depuis 1992 à l'inventaire des sites et monuments historiques. Un programme européen associe dans le parc régional du Lubéron, Bonnieux et Zagori en Grèce, Corsanou en Italie, Malloica en Espagne.

Un centre d'Études et de Recherches sur l'Architecture Vernaculaire existe avec son site Internet particulièrement riche et intéressant, avec de nombreux liens, le mot clé en eu ~ PIERRE SECHE.

Dans l'Aube douze cadoles champenoises à Courteron forment un circuit de huit kilomètres, une Association fait vivre ce riche témoignage du travail dans les vignes.

Un musée existe également en Dordogne à Dagnan c'est la Maison de la Pierre Sèche. Des collectionneurs achètent même des photos, cartes postales sur le sujet !

En Bretagne on restaure les caves de Ploerdut en pleine nature semi-enterrées...

D’autres appellations tintent à nos oreilles : gariottes ou cazelles, noms donnés dans le Lot. Les termes provençaux ne manquent pas... Les Bories sont des sortes de bergeries en pierres sèches attribuées à tort aux gaulois, leur origine est bien plus proche de nous !

Les métairies et bâtiments agricoles abandonnés deviennent : Chazeaux en Auvergne, et les ruines de villages entiers et hameaux abandonnés en pierre tentent d'être réhabilitées comme au Camp des Chazaloux ou les ruines de Ville-Vielles, commune de Saint Pierre le Chastel ( cela ne s'invente pas !) Puy de Dôme.

On trouve encore le mot cases dans la Loire, et des chambres sépulcrales couvertes d’encorbellement simple.

Il existe des ouvrages traitant sur les vestiges lithiques d'origine agricole.

 

INTERETS DU BIOTOPE

 

L'intérêt que constituent ces véritables pièges à chaleur, que sont les meurgers, est indiscutable pour certaines espèces faune- flore.

La barrière récifale, qui fait l'originalité du nord de l'Avallonnais, permet la prolifération d'une population tout à fait particulière dans notre région. La nature de ses sols n'est en rien indissociable à la préservation des meurgers. Les bocages subsistants sont un gage de qualité de l'eau, en tant que véritable château d’eau naturel. Les murs et talus qui mesurent parfois trois mètres de hauteur s’opposent au ravinement. Les reptiles trouvent un terrain propice à leur maintien dans le micro-climat ancestral. Les terres les plus pauvres des finages communaux riverains de l'Yonne et de la Cure, par exemple au sud de Cravant, avaient jusqu'ici gardé l'empreinte d'une occupation vigneronne et pastorale, plusieurs fois millénaire, voire préhistorique, ce qui avait un impact non négligeable sur leur présence, en dehors de la nature du terrain. Les chasseurs savent bien qu'il s'agit aussi de refuge à gibier.

A PROPOS DE LAVE OU LAUZE (pierre)

Victor Petit dans son descriptif de l'arrondissement d'Avallon parle déjà de couvertures de laves et de belles murailles défensives en pierre sèche ou jointoyées de glaise crue des villages du XVIème siècle.

 

Document  LE MOELLONNAGE :

         [ Cliquez ici pour y accéder ]

 

A PROPOS DES MEURGERS

 

Le travail de sensibilisation continue. Une réédition du diaporama montré à Bessy-sur-Cure en 1998 a été faite à Avallon en liaison avec les Guides de Pays et le Comité Avallonnais des mergers malheureusement relaté d'une manière pour le moins fantaisiste dans l'Yonne Républicaine.
Les échanges générés par ces réunions nous ont de plus en plus convaincus du caractère exceptionnel, qualitativement, quantitativement et du fait de leur diversité, des structures aux abords de l'ensemble Yonne-Cure.
Et pourtant, pas de protection ou de mise en valeur, pas de fouilles ou recherches officielles pour démêler le caractère de défenses, d'habitats ou refuges, de structures funéraires protohistoriques, d'enclos ou de simples épierrements et cabanes, malgré l'exemple édifiant du sud de la France sur des sites similaires. Toujours un calme très plat au niveau des élus, de la DRAC ou de la DIREN dont profitent encore les aménageurs forcenés de paysages lunaires sous forme de champs de céréales démesurés.
Consultons le site internet « Pierres sèches » d'une richesse stupéfiante pour le Card, l'Hérault, le Lot etc... face à l'absence de la Bourgogne !
Lisons le Littré faisant état des mergers ou murgiers du XIII et XIVème siècle. Redécouvrons les comptes rendus de la Société des Sciences et notamment celui de 1928/29 sur la fouille de mergers à Mailly-le-Château où on dénonçait déjà ce qu'on avait trop tendance à qualifier uniquement de produits d'épierrements (argument bien commode pour effacer des édifices relevant du patrimoine archéologique, voire en faire un commerce et ceci preuves à l'appui: sépultures, bijoux et ornements en fer et bronze apparentés à tous les édifices du continent européen y compris kourqanes du sud de l'Oural ou de l'Altaï.
N'oublions pas le travail de l'abbé Parat dans le dénombrement et la fouille des tumuli...
Quelle que soit l'origine de ce qui structure et identifie nos paysages de Basse Bourgogne, nous ne pouvons accepter désintérêt, dénigrement sans preuves et disparition de ces témoignages de l'activité humaine y compris, bien entendu, celle des générations de vignerons de l'époque gallo-romaine jusqu'à nos grands-parents. 

                                                                                                                              
J.C.Rocher

NOTES:
murger 
/mur-jé/ s.m. Terme provincial. Monceau de pierres de toute nature./ En Brie et en basse Bourgogne on dit merger. R. On dit aussi murgier et meurger. Cette enceinte est formée par les restes d'un murgier fait de moellons de craie, dont une grande partie subsiste encore aujourd'hui, Peigné Delacourt, J. César, ses itinéraires en Belgique, etc. Péronne, 1876, p.11. H. XIII è s. Les entrées dou borc estoient closes de murgieres [tas de pierres], Hist.occid. des croisades, t.II, p. 404./ XIVe s. Lequel vallet ainsi mort, ledit Nicolas l’eust fait trayner aus champs, et fait
enterrer et couvrir en un murgier de pierres, Du Cange, murgerium.

 


LE PAYSAGE DE NOS "COUTAS",
MEMOIRE DE LA VIE DES HOMMES

 

Le paysage, fait de friches, pelouses sèches, taillis de chênes rabougris et pins noirs, abandonné par les cultures, tranche sur les zones encadrantes où le remembrement a fait table rase du passé.
D'énormes tas de pierres plates calcaire (lave) organisées en bandes séparant souvent d'anciennes vignes, soutenus en pied par des murets soigneusement édifiés, et généralement, attenantes ou incluses, des cabanes faites des mêmes pierres servaient d'abri au vigneron ou au berger, assis auprès d'un feu de javelles (sarments). Des inscriptions au crayon ou à la pointe du couteau en témoignent.

Ces "cabanes de mergers" construites en "tas de charge", comme les bories du Vaucluse, dont les plus anciennes remontent probablement au XVIIème siècle sont souvent effondrées du fait de vandalisme plus que de vétusté. La disparition récente de la plupart résulte de l'utilisation de leurs pierres et de celles des mergers pour les empierrements et remblais.

Ces ensembles, mergers, murets, cabanes, enserraient les vignes (Clos ou clous) en créant un piège à chaleur propice naturellement au mûrissement mais aussi au développement de toute la faune et flore qu'on trouve habituellement sous des climats plus méridionaux.
L'énormité de certains mergers est impressionnante. Ils sont assisés sur des zones débarrassées de leur précieuse terre végétale, laquelle est venue rejoindre celle soigneusement épierrée des zones cultivées lors du "défonçage" (à la plantation de la vigne) mais aussi lors de piochages saisonniers.

Aux liens dits Les Lavières, sur les Clous, les Grands Vignes ou Vaux Peurjous, ces volumes de pierres liés au parcellaire infiniment divisé par les héritages (les bandes de 2 à 3 m correspondantes à 2 ou 3 perchées de vigne) témoignent du labeur d'une population essentiellement vigneronne jusqu'au phylloxera.
Certains mergers recouvrent des édifications plus anciennes que la vigne (pourtant arrivée au haut moyen âge) et notamment des tombes néolithiques. La proximité de la voie romaine (d'Aggrippa) à moins d'un kilomètre, fait qu'on peut aussi se demander si certains murs parfaitement édifiés ne sont pas en rapport avec celle-ci.

De même, on sait qu'ils servaient de limites de propriété mais aussi d'enclos pour les troupeaux. Certains n'ont-ils pas été initialement construits pour cet usage avant l'apparition du vignoble ?

En résumé, ce site, en abritant gibier, faune et flore sauvage, relique des paysages de basse.
bourgogne, est riche à la fois des réponses qu'il nous donne sur l'organisation de la vie rurale
jusqu'au vingtième siècle mais aussi et surtout des questions encore en suspens à ce sujet. Il
mériterait probablement, rien qu'à ce titre, outre ses qualités propices au gibier, d'être un but
de promenades et de randonnées plus fréquenté et faire l'objet d'études et de protection
particulière.

Document ADYC


GALERIE DE PORTRAITS

 

Pierre HAASE : Dans le peloton de tête des spécialistes des cabanes de vignes et de la pierre sèche en France. Auteur de très nombreux textes, relevés, recherches... Disponible et sensible à tout ce qui touche ce domaine, particulièrement dans l'Yonne, où il a des attaches à Asquins.

 

Jean Claude ROCHER : Alerteur éternel des risques pour l'environnement qu'il connaît et protecteur de ce qui peut-être sauvé, malgré les bulldozers... Partie prenante grâce à des photos, textes et conférences. Investi de responsabilités d'élu municipal et associatif.

 

Bernard FEVRE :Considéré comme "trop" passionné pour certains, il a le mérite de faire un travail d'inventaire méthodique dans le secteur de Guillon et de "questionneur" auprès des autorités. Les réponses d'érudits "officiels"ne sont pas toujours là, lui oui !

 

Claude LIGER : Bien connu pour ces actions sur le site de Cora, dans la vallée de la Cure, il travailla, entre autres sur le répertoire des loges, sortes de cabanes en pierre sèche. Il a acquit une connaissance globale sur l'évolution de cette zone, au niveau humain et patrimoine bâti.

 

Guy DEMANCHE : Historien local, cet enseignant à la retraite a battu la campagne avec Daniel Delaunay et a trouvé dans les bois de Châtel-Censoir des restes en pierre sèche curieux. Il ne trouva pas de réponse satisfaisante à sa rationalité. Les deux amis constituèrent donc un inventaire rigoureux du site et une riche collection de photos.

 

Roland BRISSET : Amoureux de la nature, cet ancien instituteur mailly-castelois pris son bâton de marcheur pour se rendre compte sur le terrain. Il inventoria méticuleusement sur cartes IGN les traces visibles, celles dont on lui a parlé, classifie par intérêt pour les autres curieux, dans un esprit de vulgarisation exemplaire...

 

Josiane MAXEL : La petite dernière dans le coin, elle s'enthousiasme pour ces tas de pierres et met à disposition ses connaissances en matière de communication, presse, site Internet, pour faire découvrir ce patrimoine méconnu, qui donnera peut-être naissance aux Routes des Meurgers dans lAvallonnais.

 

Et il y en a d'autres... Comme ces anciens aux mille anecdotes, dont celle-ci à Irancy où un aîné avait trouvé, gosse, une pièce sur un meurger, énorme; la fait expertiser et garde religieusement : c'est un "jeton allemand du Moyen Age" ! Cet ancien habitant de Sacy qui inventoria et photographia les "siens", tombant sous le charme, son épouse en pris modèle pour source d'inspiration dans des représentations picturales. Ou encore cet agent ONF qui se mobilise pour le POS de son village près de Vézelay...

 

MERCI A TOUS

 



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REPRODUCTION INTEGRALE DE LA BROCHURE :
LES MEURGERS (ou MURGERS) Habitat rural en Pierre sèche;

( Avec l'autorisation de Madame Josiane MAXEL ( Présidente de l'Association des Guides de Pays de la Vallée de L'Yonne )

Brochure -parue en 2001- réalisée et éditée et imprimée par l'Association des Guides de Pays de la Vallée de L'Yonne
5, Chemin des Clercs 89660 Mailly le Château

( Brochure réalisée en partenariat avec le Comité Icaunais des MEURGERS et l'aimable participation de Pierre HAASE et Jean Claude ROCHER )

( Les textes et les photos reproduits dans cette page sont sous copyright de leurs auteurs respectifs )



 

 

 

Rubriques Découvertes

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